Toute la vie est un yoga. Par ce yoga intégral, nous ne cherchons pas seulement l'Infini: nous appelons l'Infini à se révéler lui-même dans la vie humaine. Sri Aurobindo LA PEINTURE INDIENNE

SRI AUROBINDO
. . YOGA INTÉGRAL


Les négations de Dieu sont aussi utiles pour nous que Ses affirmations. Sri Aurobindo
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C'est le Supramental qu'il nous faut faire descendre, manifester, réaliser.

LA PEINTURE INDIENNE





Toutes les nations occidentales et orientales ont fini par admettre que notre Mère Inde était le trésor inépuisable de la connaissance, du dharma (religion), de la littérature et de l'art. Mais autrefois l'Europe considé­rait que malgré notre grande littérature et notre art, la peinture indienne n'était pas tellement fameuse ; au contraire, on la trouvait hideuse, dépourvue de toute beauté. Nous-mêmes, éclairés par la connaissance occidentale et considérant le monde à travers les lunettes européennes, condamnons la peinture et la sculpture indiennes afin de faire preuve de notre intellect raffiné et de notre goût infaillible. Les maisons de nos riches étaient envahies par des « moulages » ou des imitations sans âme, des statuettes grecques ou des peintures anglaises ; les murs des maisons du peuple décorés de peintures à l'huile hideuses. Les Indiens dont le goût et l'habileté artistiques étaient uniques dans le monde, les Indiens dont le goût était spontanément infaillible dans le choix des couleurs et des formes, sont devenus aveuglés, leur intelligence incapable de pénétrer la signification de l'art, leur goût inférieur même au goût des colporteurs et laboureurs de l'Italie. Ainsi Râjâ Ravi Varmâ put s'annon­cer comme le meilleur peintre de l'Inde.

Dernièrement, grâce à l'enthousiasme de quelques experts en art, les Indiens ont commencé à ouvrir leurs yeux et à se réveiller à la réalité, à apprécier leur propre capacité et leur propre richesse. Inspirés par l'exceptionnel génie d'Abanindranath Tagore, un nombre de jeunes peintres sont en train de restaurer la peinture oubliée de l'Inde. Grâce à leur génie, une nouvelle ère s'est ouverte au Bengale. Et, par la suite, on peut espérer que l'Indien tâchera de tout voir non du point de vue des Anglais, mais avec ses propres yeux, abandonnant des imitations de l'Occident, il dépendra de sa propre intelligence limpide et exprimera l'âme éternelle de l'Inde à travers des formes et des couleurs peintes.

Il y a deux raisons derrière l'antipathie des Occidentaux envers la pein­ture indienne. D'après eux les peintres indiens sont incapables d'imiter la nature ; au lieu de dessiner un homme comme un homme, les che­vaux comme des chevaux, les arbres comme des arbres, ils en reprodui­sent des images déformées, ils n'ont pas de perspective, leurs peintures sont plates, anormales. Leur deuxième raison est qu'il y a un manque total de beaux sentiments et de belles formes dans ces peintures. Cette objection commence à se faire rare. Tout en reconnaissant l'extraordinaire paix sur nos anciennes figures du Bouddha, ou l'expression d'une puissance cé­leste dans nos anciennes statues de Durgâ, les Européens restent stu­péfaits, enchantés. Ceux qui sont reconnus en Angleterre comme les meilleurs critiques d'art ont avoué que bien que les peintres indiens ne connaissent pas la perspective des Européens, les règles de la perspective de l'Inde ont été très belles, complètes et logiques. Il est vrai que les peintres et les autres artistes indiens n'imitent pas tout à fait le monde extérieur. Ce n'est pas par incapacité, c'est qu'ils tâchent de dépasser les formes et les paysages extérieurs afin d'exprimer la vérité et l'état d'âme les plus profonds. La forme extérieure n'est qu'un voile, un dégui­sement de cette vérité intime — épris de la beauté de ce déguisement, nous sommes incapables d'apprécier ce qui se dissimule à l'intérieur. Par conséquent les peintres indiens ont expressément modifié la forme exté­rieure afin de la rendre capable d'exprimer la vérité intérieure. On n'a qu'à s'émerveiller de voir la manière exquise dont ils arrivent à expri­mer la vérité innée d'un événement ou d'un état d'âme à travers chaque membre, arrière-fond, posture et vêtement de leur sujet. C'est là la qua­lité principale de la peinture indienne, c'est là son excellence.

L'Occident est préoccupé de la fausse sensibilité extérieure, il adore l'ombre ; l'Orient est à la recherche de la vérité intérieure ; nous ado­rons l'éternel. L'Occident glorifie le corps, et nous l'âme. L'Occident est amoureux des noms et des formes tandis que nous ne sommes jamais satisfaits tant que nous ne trouvons pas l'essence éternelle. Cette diffé­rence se manifeste partout : et dans la religion, et dans la philosophie, et dans la littérature aussi bien que dans la peinture et l'architecture.


Sri Aurobindo, Dharma (Calcutta) 1909-1910

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